Loketz et Meyer : deux familles dans les rafles de Lorraine en mars 1944

Après huit décennies, beaucoup de familles juives ignorent le sort de l’un de leurs membres après l’arrestation et la déportation pendant la Shoah. Confronté depuis dix ans à retrouver des traces, des visages, des faits dans les limites de ce que peuvent nous révéler témoignages et archives, j’accompagne au mieux ces personnes qui me contactent pour en savoir davantage. Et toujours, une émotion bouleversante quand ces victimes reviennent à nous, sortent du silence sous l’épaisseur de la poussière du temps. Elles sont parfois là, près de nous. Petites traces sur des rapports jaunis, petits nœuds qui permettent de retisser le fil d’un parcours au cœur de la barbarie nazie.

J’en perle mes joues quand se dessine plus clairement un itinéraire de vie avant, pendant et après cette Nuit. Alors imaginez ce que peuvent ressentir ces personnes, plus de soixante-dix ans après les faits, en découvrant des bribes de vérité sur ce qui fut, pour un parent, à la lecture de mes synthèses ou récits de recherche. Des points d’interrogations longtemps accrochés au silence des réponses, tombent enfin ; d’autres restent suspendus.

Au cours du mois d’octobre 2022, deux personnes de deux familles distinctes, mais toutes deux originaires d’Alsace-Lorraine, m’amenèrent à découvrir leurs parcours qui se rejoignirent dans un même convoi : le n°71 du 13 avril 1944. Autres circonstances surprenantes durant cet automne naissant, ces requêtes coïncidèrent avec mon organisation de la conférence de Ginette Kolinka à Château-Thierry, elle-même déportée dans ce transport vers Auschwitz.

C’est d’abord une personne de la ville de Benfeld en Alsace, monsieur W. octogénaire, professeur à la retraite. Il rédige ses mémoires pour ses descendants. Il souhaite consacrer un chapitre concernant ses voisins. Parmi eux, il y avait une femme, Germaine Loketz, douce et discrète, marquée d’un tatouage sur son avant-bras gauche. L’ancien professeur est très proche du fils de Germaine mais tous deux ont été confrontés au mur de silence de la survivante d’Auschwitz déportée avec sa mère, Marguerite, qui n’est pas revenue. Une rare évocation de Germaine sur sa déportation hante et interroge encore ses proches. C’est pour combler ces silences que monsieur W. prit le temps de m’écrire pour demander mon aide.

Monsieur M. est un parent d’un de mes anciens élèves à Château-Thierry, au fait de mes travaux. Des parents de sa branche paternelle ont été déportés ; un couple : Samuel et Rosine Meyer et leurs deux enfants, Paulette et Jules. Là encore, il sait peu de chose sur les circonstances de l’arrestation et de la déportation.

Reconvoquons le passé et retrouvons le contexte de la persécution des Juifs de France au début de l’année 1944.

Récit : Loketz et Meyer : deux familles dans les rafles de Lorraine en mars 1944

A propos Stéphane Amélineau

Professeur documentaliste : Lycée ITG Val-de-Beauté à Joinville-le-Pont (94 - Val-de-Marne) de 1994 à 2001. Lycée Françoise Cabrini à Noisy-le-Grand (93 - Seine-Saint-Denis) de 2001 à 2007. Lycée de Saint-Rémy à Soissons (02- Aisne) de 2007 à 2018. Collège-Lycée Saint-Joseph à Château-Thierry (02 - Aisne) depuis 2018.
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